samedi 2 février 2019

Bonne fête de la Lumière


Ce matin-là, comme tous les jours, Syméon s’est mis à l’écoute de sa petite voix : "Seigneur, serait-ce aujourd’hui ?". Syméon a eu autrefois ce songe qu’il ne mourrait pas avant d’avoir rencontré le Messie du Seigneur, que ses yeux verraient le salut préparé pour les peuples, la lumière qui allait se révéler aux nations et donner gloire à son peuple ; malgré son grand âge, il attend dans l’espérance l’accomplissement de cette promesse. Chaque matin, sa demande reste sans réponse, mais ce jour-là, ô joie !, il entend qu’il doit partir avec empressement vers le Temple de Jérusalem.
Sur le chemin, il se pose bien des questions sur ce qui l’attend : verra-t-il une nuée recouvrir le Temple, une colonne de feu illuminer toute la ville de Jérusalem, et dans des éclairs et le tonnerre entendre la voix du Seigneur annoncer Son retour ? Il se rappelle que Moïse avait eu cet avertissement, en réponse à sa requête Je t’en prie, laisse-moi contempler ta gloire (Ex 33, 18) : un être humain ne peut pas me voir et rester en vie (Ex 33, 20). Il se dit alors que ce jour est sans doute le dernier de sa vie…
En arrivant dans le Temple, tout est calme et il cherche du regard vers qui aller ? Il aperçoit un jeune couple venu présenter son premier-né comme le veut la Loi du Seigneur, mais se dit en voyant qu’ils avaient préparé pour le sacrifice un couple de petites colombes : ce n’est pas vers cette famille que je dois aller, ce sont des pauvres. Mais, irrésistiblement, il se sent attiré vers ce petit enfant, né il y a 40 jours. Et l’Esprit-Saint, présent dans les colombes, lui dit : Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie (Mt 3, 17). Alors il comprend et demande à Marie de prendre l’enfant dans ses bras et s’écrie d’une voix forte : Maintenant, ô Maître souverain, tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix, selon ta parole. Car mes yeux ont vu le salut que tu préparais à la face des peuples, lumière qui se révèle aux nations et donne gloire à ton peuple Israël (Lc 2, 29-32).
La lumière attendue n'était pas une colonne de feu, mais une petite flamme vacillante vers laquelle on vient se réchauffer en famille, le salut espéré ne pouvait pas venir d’une force toute puissante, mais de cette fragilité que Syméon trouve à la fois en lui et dans ce petit enfant, faible et dépendant, la gloire de Dieu ne pouvait pas se manifester de manière triomphante, mais dans la petitesse. Il revivait l'histoire du prophète Elie sur l'Horeb : le Seigneur était présent comme dans le murmure d'une brise légère (1R 19, 12). Conscient que cette révélation, dont il venait d’être le bénéficiaire privilégié, allait à l’encontre de ce que le peuple d’Israël attendait, il ajouta des paroles plus dures à l’attention de Marie : cet enfant sera signe de contradiction et toi, ton âme sera traversée d’un glaive (Lc 2, 34-35).
Quand les communautés Foi et Lumière célèbrent cet événement que nous appelons la Fête de la Lumière, que célébrons-nous ? Nous nous rappelons la joie de la rencontre entre Marie, Joseph, Syméon et Anne autour de Jésus, qui étaient déjà comme une petite communauté. Nous nous réchauffons autour de la lumière qui se révèle aux nations au travers des plus petits d’entre nous, nous témoignons du salut que nous recevons de manière privilégiée quand nous reconnaissons que Jésus nous attend dans la fragilité. Notre prière le dit bien : apprends-nous à découvrir ton visage et ta présence en tous nos frères et sœurs, spécialement les plus faibles.
Nous devons témoigner sans relâche autour de nous que cette révélation faite à Syméon est destinée à tous. Dieu n’attend pas de nous que nous recherchions ce qui est grand et fort pour aller à sa rencontre, Il n’attend pas de nous que nous devenions des surhommes pour nous faire proches de lui, Il attend que nous nous mettions à son écoute, il nous apprendra alors à accueillir nos blessures et nos faiblesses, c’est par elles que se déploiera sa puissance. Cela ne nous évitera pas les épreuves, nos enfants ayant un handicap seront appelés également à être signes de contradiction, les parents auront eux aussi l’âme transpercée d’un glaive, mais ça ils le savent depuis longtemps…

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