mercredi 5 juillet 2017

Ne craignez pas !


Le Vésuve et la baie de Naples depuis la château St Elme
Pour la fête de la Pentecôte 2017, j’ai bouclé la boucle des provinces Foi et Lumière ; la province Mers et Volcans (Sud de l’Italie) est en effet la 52ème province que j’ai visitée depuis 2008. Il est important pour le coordinateur d’aller à la rencontre de tous sans discrimination de distance, ce n’est pas parce que la province est éloignée qu’il ne faut pas y aller, au contraire ! Mais cette fois, pour aller à Naples, ce n'était pas trop loin !
Le Vésuve depuis Castellamare
En ce début du mois de juin, la province Mers et Volcans, la bien nommée, s’est réunie à Castellamare di Stabia (au bord de la mer Tyrrhénienne), et au pied d’un volcan, le fameux Vésuve. C’était le moment choisi pour l’assemblée de la province et toutes les communautés de Campanie, des Pouilles, de Basilicate et de Sicile étaient venues pour ce moment important de la vie de la province. Je suis arrivé la veille et j’ai été accueilli par Bruno Galante, de Naples, qui m’a fait les honneurs de sa belle ville, et de son centre historique. Nous avons vu l’église du Gesù Nuovo, la basilique Santa Chiara et son beau cloître, la cathédrale, il Duomo San Gennaro, le château Saint Elme qui domine toute la baie de Naples pour ne citer que les principaux lieux visités, sans oublier une dégustation de la grande spécialité napolitaine,  la pizza !
A Castellamare, pendant trois jours, des temps de réflexion, de prière, de discernement, mais aussi des temps de fête ont rythmé le programme. Chaque jour, un mot clé était donné en référence au thème de la rencontre "Ne craignez pas !" : avoir confiance (ce qui fait que les relations que nous avons entre nous sont solides, que nous pouvons compter les uns sur les autres), s’abandonner (laisser toute sa place à l’Esprit Saint pour nous accompagner) et être transformé (ne plus avoir peur de l’autre). 


Carlo et Vito
Concours de danse
Le discernement a trouvé très naturellement sa place dans cette trame et, Vito Giannulo a été élu coordinateur de la province pour succéder à Carlo ; un grand merci à tous les deux ! Vito est journaliste et est le fils de Vanna Rossani, ancienne coordinatrice nationale de l’Italie. Puis nous avons vécu la traditionnelle fête où, avec Vito et Lucia, comme membres du jury, nous avons dû départager les équipes en course pour le plus beau chant, la plus belle danse…
Vito reprend la bannière de la province
Cave canem
Sur le chemin du retour, nous avons visité les ruines de Pompéi : ce fut une relecture des livres d’histoire de ma jeunesse. J’y ai retrouvé toutes les images qui avaient marqué ma mémoire, les passages pour piétons, les mosaïques de chien (cave canem)…

Ce que je retiens surtout de ces trois jours, c’est la rencontre d’une maman de Sicile venue avec son fils, deux fois plus grand qu’elle, et très handicapé. La tendresse avec laquelle elle s’est occupée de lui, sa grande foi, son grand désir que Jésus vienne à la rencontre de son fils, m’ont énormément touché. Rien que pour elle, ça valait le coup de fonder Foi et Lumière ! Et j’ai compris qu’elle ne connaît Foi et Lumière que depuis peu de temps… Combien comme elle sont en attente de nous rencontrer ? Ne craignons pas d’aller à leur rencontre !

jeudi 29 juin 2017

En marche vers la paix avec Dorothée et Nicolas

Frère Nicolas
Le tableau de la roue
Il y a 600 ans naissait Nicolas de Flüe (ainsi nommé car né dans une ferme de Flüeli) dans le canton d’Obwald, au plein cœur de la Suisse. A 30 ans, il se maria avec Dorothée et ils eurent dix enfants, cinq garçons et cinq filles. Vingt ans plus tard, juste après la naissance de leur dixième enfant, il a tout quitté pour devenir ermite au Ranft. Sa spiritualité peut se résumer à la contemplation quotidienne de son livre de prière, le fameux tableau de la roue. Il a souvent été consulté par les uns et les autres pour résoudre des différends plus ou moins importants et les réponses lumineuses qu’il a données ont fait de lui un des principaux saints patrons de la Suisse car il a su ramener la paix et la communion entre tous. On peut juste regretter que sa femme Dorothée, qui avait compris que l’appel que son cher mari avait reçu le dépassait, la dépassait, et qu’ils avaient besoin tous les deux de s’abandonner à la Miséricorde divine, n’ait pas elle aussi été canonisée… Mais les communautés Foi et Lumière de Suisse et du Jura français les ont fêtés tous les deux ensemble, associant Dorothée à frère Nicolas, pour se mettre en marche vers la paix.
La célébration d'ouverture avec Mgr Jean-Marie Lovey, évêque de Sion
L'arbre de la paix
Nous étions environ 250 pèlerins à nous être mis en route pour rejoindre le pays de frère Nicolas, dans le petit village de Sankt Niklausen : le cadre était magnifique, au-dessus du lac de Sarnen, au-dessous de superbes sommets, au milieu des vaches… Nous avons pu aller visiter le Ranft et l’ermitage de frère Nicolas, célébrer la réconciliation par une très belle liturgie, concrète et priante, fêter la paix avec une très belle animation musicale, construire un arbre de la paix, danser, chanter, prier tous ensemble dans une grande amitié. Nous avons repris à notre compte les dix règles de la paix que chaque communauté a illustrées à sa manière.
Un groupe de scouts était venu apporter leur aide, des jeunes pleins d’énergie, et j’ai pu constater que, comme d’habitude dans de telles circonstances, ceux qui viennent aider finissent par réaliser qu’ils reçoivent plus que ce qu’ils ont pu donner.
La fête finale pleine de joie
Joséphine était venue de Chypre pour ne pas oublier que son pays est divisé et que tous y attendent aussi la paix.
Sur le chemin du retour, nous avons pu découvrir des paysages superbes de lacs, de montagnes et de vallées jusqu’à la maison de Gabrielle et Pierre-André, très accueillants et heureux de nous faire découvrir leur ville de Gruyères et les montagnes environnantes ! Merci !
Je n'oublie pas la prière de frère Nicolas que nous avons chantée si souvent... 



"Mon Seigneur et mon Dieu, prends-moi tout entier pour Toi, mon Seigneur et mon Dieu. Arrache de moi tout ce qui m'empêche d'être à toi ; Accorde-moi tout ce qui peut me rapprocher de Toi ; Délivre-moi de moi-même et prends-moi tout entier pour Toi."

Le père Klaus n'avait pas apporté son cor des Alpes, mais on a  pu en voir.
Isabelle, Joséphine et Gabrielle à plus de 2000 mètres (Moléson)

Album photo




vendredi 9 juin 2017

Marie, femme de Cléophas, continue sa route…

Conférence à Gap
Au cours des dernières semaines je suis allé présenter le livre "Moi, Marie, femme de Cléophas" au centre diocésain de Gap (Hautes Alpes), à la librairie UOPC de Bruxelles, puis à la Viale-Europe, une communauté d’environ 25 jeunes adultes venus à Bruxelles pour le travail ou leurs études. Entre temps, j’avais été invité à une séance de signature à la librairie de la Procure à Versailles. Enfin, au cours d'un pèlerinage en Suisse, j'ai été invité à présenter le livre aux communautés de la province "Monts et Vallées sans Frontière".
On me demande souvent quelle a été l’inspiration qui m’a poussé à écrire ce livre, quelles sont les origines de cette initiative. Je réalise de plus en plus, à force de répondre à toutes ces questions, combien ce travail d’écriture me dépasse. Cette femme, Marie, n’est mentionnée qu’une seule fois dans un verset des Évangiles (Jn 19, 25) : je suis allée la retrouver pour raconter, à travers elle, ma propre histoire. J’ai voulu, à travers ses aventures et ses tribulations, dire combien son amitié avec Jésus et Marie sa mère ont bouleversé sa vie. Pour cela, il m’a fallu faire trois exercices très périlleux : remonter le temps d’environ 2000 ans, voyager jusqu’en Terre Sainte (où je ne suis encore jamais allé), et surtout… me mettre dans la peau d’une femme !
Conférence à Bruxelles
J’ai si souvent entendu Jean Vanier parler de l’Évangile comme s’il avait véritablement été le témoin de ce qu’il raconte. Il est si familier de tous ces personnages qui peuvent nous paraître lointains que j’ai tenté à mon tour de pousser les portes qui existent - si on les cherche bien - pour entrer et aller me promener dans tous ces lieux dont parlent les évangélistes. Et ça marche ! Et j’ai réalisé que ce que disent Jean Vanier et Marie-Hélène Mathieu est vrai : ce ne sont pas eux qui ont fondé Foi et Lumière ou l’Arche, mais Jésus et Marie sa mère ! J’ai découvert combien Saint Pierre peut être d’un tempérament simple, chaleureux et coléreux ; j’ai imaginé Saint Paul dur avec les autres et avec lui-même, mais attentif aux autres et capable de se remettre en cause devant la simplicité d’un jeune garçon handicapé.
Présentation du livre en Suisse
Aujourd’hui, Marie, la femme de Cléophas a traversé les siècles et elle m’accompagne et me pousse à être attentif à chacun. Ces communautés de rencontre qu’elle a fondées à l’initiative de Jésus et de Marie à partir de Béthanie, elle a le souci de les voir continuer à se développer partout où cela est possible.
C’est ainsi que j’ai été touché par cette jeune femme, maman d’un enfant trisomique de trois ans : je n’ai pas pu lui conseiller de rejoindre la communauté Foi et Lumière de sa paroisse car ils sont bien plus âgés en moyenne qu’elle… Elle n’a comme seul secours et seul objectif de rejoindre d’autres parents comme elle à travers les réseaux sociaux pour échanger et partager ; elle y trouve pour le moment du réconfort et les informations nécessaires sur les prises en charge possibles pour son fils ; elle peut dire plus de choses à travers l’anonymat de son clavier et de son écran d’ordinateur… mais il faudra bien un jour qu’elle passe par de vraies rencontres et de vraies amitiés.
J’ai aussi rencontré une autre maman. Son fils handicapé est bien plus âgé et a une sociabilité quasiment nulle ; c’est un grand gaillard deux fois plus grand qu’elle et le seul réconfort qu’elle a (elle vit seule avec son fils depuis que son mari l’a quitté) est de venir à Foi et Lumière qu’elle a découvert depuis peu. Elle paraît toujours très tendue, anticipant tout ce que son fils peut imaginer, et ses larmes ne sont jamais très loin… Que faire pour l’aider et la soulager ? Comment rejoindre les autres familles qui sont comme elles ?

Foi et Lumière n’a peut-être pas qu’un seul modèle pour venir en aide aux familles qui ne s’en sortent pas toutes seules. Il faut se mettre à l’ouvrage pour trouver des solutions nouvelles, à l’intérieur du cadre défini pour l’appel, l’identité et la mission de Foi et Lumière que nous avons travaillé récemment. Marie, femme de Cléophas, veut nous inciter à faire comme elle, à faire comme Jean et Marie-Hélène l’ont fait à leur tour : nous sommes tous appelés à être fondateurs, à imaginer des solutions nouvelles pour soulager les familles qui ont tant de mal à vivre la solitude, la souffrance, le rejet à cause de leurs enfants ayant un handicap. Il faut y aller !

lundi 24 avril 2017

Dis, papa, pour qui on va voter ?

Au lendemain du premier tour, je me pose beaucoup de questions quant au deuxième tour du 7 mai prochain... Avec Julie, nous avons voté de manière identique, un vote de conviction ; voter, c'est voter pour quelqu'un, un programme, des idées, ce n'est pas voter, au terme de réflexions stratégiques plus ou moins fumeuses, contre quelqu'un de manière à favoriser l'élimination de tel ou tel adversaire pour la suite des élections.
Quel candidat présent au deuxième tour s'est clairement exprimé pour la défense de la vie, comme le demandent les évêques de France ? "La dignité de notre société se reconnaît au respect des plus faibles de ses membres depuis le début de leur vie jusqu'à leur fin naturelle". Quel candidat se prononce pour la défense de la famille, tissu nourricier de la société ? 
Je ne me vois pas expliquer à Julie des recommandations de vote que je ne saurais pas m'appliquer à moi-même.
Donc, j'en conclus qu'aucun des deux candidats n'aura notre voix. Et nous prierons pour notre pays.

jeudi 6 avril 2017

Aller à Lourdes, c’est comme revenir à la maison.

Aller à Lourdes pour une rencontre Foi et Lumière, c’est comme revenir à la maison ! On s’y sent toujours chez soi, mais c’est aussi à chaque fois une nouvelle te enrichissante expérience.
Les 11 et 12 mars, la province "Entre deux Mers" s’est retrouvée à la Cité saint Pierre, là où a eu lieu notamment la rencontre internationale d’octobre 2008, le conseil des coordinateurs de février 2011. Que de bons souvenirs ! Même avec un programme très chargé, j’ai pu prendre le temps de descendre jusqu’au sanctuaire pour y déposer toutes les intentions que j’avais reçues de ma famille de mes amis et de Foi et Lumière.

Cette assemblée provinciale a eu lieu selon les "canons" de Foi et Lumière : bilan des quatre années passées, choix des priorités pour les quatre prochaines années, présentation des personnes qui ont été nommées pour faire partie de la nouvelle équipe provinciale, discernement, élections, action de grâce… Rien de très original, semble-t-il, mais à l’intérieur de figures imposées, il peut y avoir beaucoup de libertés pour manifester de l’originalité dans l’attachement que nous portons à Foi et Lumière.
D’une manière symbolique, l’ensemble de l’ancienne équipe a déposé son tablier de service avant le début de l’assemblée et la nouvelle équipe a repris le tablier à la fin de l’assemblée. Même si Michel et Sabine Arduino, accompagnés par Sam, ont repris du service, ils ont été pendant le temps de l’assemblée des délégués presque comme les autres.
Le temps de discernement a été suivi par un temps d’adoration devant le Saint Sacrement, une manière de se placer dans les mains de Jésus, pour qu’il puisse indiquer à chacun qui Il avait choisi pour accompagner la province.
La veillée a été très joyeuse ; il fallait deviner quelques figures de Foi et Lumière de trois manières différentes, avec des explications, par un mime, par un seul mot… et comme d’habitude, notre célèbre esprit de compétition a fait que chacun a gagné !
Jean-Luc raconte le pèlerinage de 1975 à Rome
Pendant tout le temps de cette assemblée, nous avons pu admirer les talents d'artiste de Jean-Luc Chaigneau ; il habite à La Rochelle et a participé à tous les pèlerinages internationaux de Foi et Lumière depuis 1971 ! Il a notamment réalisé un album de dessins (plus de 150 planches) qui raconte les premiers pèlerinages avec talent et beaucoup d'humour ! Hisse et Ho a parlé de lui en juin 2010 (numéro 6).




La messe du dimanche fut célébrée par le père André Cabes, recteur des sanctuaires de Lourdes, et ancien aumônier de communauté. Quand Monseigneur Jacques Perrier nous disait que Foi et Lumière faisait partie du patrimoine génétique de Lourdes, il ne se trompait pas !

Bonne route à la nouvelle équipe, que Notre-Dame de Lourdes veille sur vous !
La nouvelle équipe provinciale

jeudi 23 mars 2017

Les aventures de l'ECI en Géorgie

Marche dans la fraîcheur matinale avec Judex
Début mars, l’équipe de coordination internationale s’est retrouvée pour trois jours de travail à Cerovani, en Géorgie.
Tous n’étaient pas présents : Valerie était restée pour travailler pour sa thèse, Corinne était allée entourer Louise pour les funérailles de Henri Major et Ann... Ann est bien arrivée jusqu’à Tbilissi, mais à son arrivée, elle a reçu de mauvaises nouvelles de sa fille Rebecca et elle a aussitôt fait demi-tour… Grâce à Dieu, c’était moins grave que ce qu’elle craignait, mais elle nous a manqué.
Le voyage est long pour aller jusqu’à Tbilissi et les uns et les autres, malgré des heures d’arrivée parfois bien tardives, ont été à chaque fois accueillis par quelqu’un de Foi et Lumière qui était là pour nous emmener jusqu’à Cerovani ; pour ma part, je suis arrivé avec Guénaël à 2 heures du matin et le transport des écouteurs de traduction ont nécessité (comme souvent) beaucoup de diplomatie et de patience… surtout quand ça se passe au milieu de la nuit !
Chez Monseigneur Giuseppe Pasotto
Pour ceux qui étaient arrivés le plus tôt, un déjeuner était prévu chez Monseigneur Giuseppe Pasotto, administrateur apostolique du Caucase, qui exerce un rôle pastoral équivalent à celui d'évêque pour les catholiques de rite latin en Géorgie et en Arménie. Ce fut un moment très chaleureux et il nous a très bien reçus. Il était notre hôte car la maison où nous nous trouvions, Tagba House, dépend de lui. Nous avons ensuite visité la vieille ville avant de revenir à Cerovani en passant par l’ancienne capitale de la Géorgie, dont les souverains (au IVème siècle) se sont convertis au christianisme, faisant de leur pays le premier pays chrétien, sous l’influence de sainte Nino de Cappadoce.
Les temps de travail ont été très intenses et fructueux, car, outre le temps des rapports de chacun des membres de l’équipe, nous avons évoqué les questions du rassemblement des jeunes à Guardamar en août 2017, l’identité et la mission (dans la continuité de ce qui avait été fait en Pologne) auxquelles nous avons ajouté l’appel, les finances, la rencontre internationale de 2018… Nous avons aussi beaucoup prié, notamment pour Henri Major, dont les funérailles ont eu lieu pendant que nous étions réunis.
Eka présente les membres des communautés présentes
Et nous avons reçu la visite de membres des trois communautés de Géorgie (la Source, la Vigne et la Fleur du désert). Ce fut un temps très chaleureux et animé : chants, jeux, danses ont rythmé les quelques heures passées ensemble. Nous avons senti combien chacun était heureux de se retrouver ensemble ! Mais ce fut trop rapide, comme toujours et il a fallu repartir. La dernière soirée à Tagba House fut très mouvementée et joyeuse; Rebecca s’est retrouvée momifiée et grâce à l’intervention du Père Isaac, elle a pu revenir parmi nous ! Le tout étant mis en scène par Amgad avec l’aide de Raúl…



Dernière soirée à Cerovani


Nous nous retrouverons avec joie comme toujours pour de nouvelles aventures début 2018, sans doute sur le lieu de la rencontre internationale…

jeudi 9 mars 2017

Le câlin eucharistique

Marie-Odile Frey, coordinatrice de la province France Est Pétillante, est chargée de la pastorale d'un centre pour personnes handicapées à Cernay (Alsace), l'institut Saint André géré par l'association Adèle de Glaubitz. Les messes qui y sont célébrées sont pleines de ce que chacun peut y apporter, joie, peines, cris, souffrances, mais tout cela est transfiguré dans l'Eucharistie. A cette messe, les membres de la communauté Foi et Lumière locale sont également présents. Le texte qui suit a été rédigé par Christophe, le jeune aumônier du centre, après qu'il y ait célébré sa troisième messe dominicale. Il dit combien cette célébration l'a transformé, l'a fait grandir, a été pour lui une véritable rencontre avec Jésus...

C’était dimanche matin. La chapelle était assez remplie ce jour-là. Les premières personnes installées dans les bancs où devant les premiers bancs dans leurs fauteuils roulants attendaient le début de la messe. La porte était grande ouverte et on s’agitait dans le chœur pour que tout soit prêt, que tout soit en place pour célébrer l’eucharistie en ce jour du Seigneur. 
Ici, même si les horaires sont respectés, on n’est pas à une minute près. Non on n’est pas pressé : « A saint André, on prend son temps » dit Marie-Odile, chargée de la pastorale. Il faut du temps.
Du temps pour que les résidents arrivent, seuls, ou accompagnés par une autre personne qui les aide à se mouvoir ou à pousser le fauteuil roulant.
Il y a ceux qui habitent ici, les résidents, ceux qui y travaillent, les professionnels. Il y a ceux qui viennent célébrer la messe à l’Institut, parce que l’ambiance est différente, parce que la chapelle est accueillante, chauffée, belle ; parce que la liturgie est belle, simple mais soignée, parce que l’horaire les arrange. En arrivant chacun est accueilli par une des personnes handicapées de ce grand Institut et qui propose à chacun une feuille de chants.
Oui, ici, à Saint André, tout le monde a le droit de chanter. Ce n’est pas une chorale qui donne un concert depuis sa tribune ou dans le chœur, et qui fait de l’assemblée un public, venu écouter une nouvelle performance. Non, chacun chante avec. Et tant pis s’il y a deux, trois, quatre, cinq mélodies différentes pour la même partition : on chante ! En attendant de débuter la célébration, une musique de fond aide à garder le silence et à veiller à une ambiance propre au lieu. Marie-Odile veille à cette ambiance, au respect du lieu. Et même si certains s’expriment par des cris, des râles, des gestes amples, des onomatopées plus ou moins graves, plus ou moins stridentes, on sent que les personnes connaissent ce lieu, qu’elles aiment y venir prier, célébrer, que la messe est un rendez-vous désiré, attendu. Sœur Emmanuelle, quant à elle, finit de tout préparer, de la sacristie vers le chœur, et malgré ses 90 ans, grimpe les marches et les échelles pour allumer les bougies au maître-autel, sur l’autel de célébration, aux autels de Marie et de Joseph.
Elle aime tant saint Joseph. C’est un peu son chouchou. Elle n’hésite pas à témoigner de la puissance du gardien de la sainte Famille vers qui elle fait monter ses prières secrètes. La dernière en date : la nomination d’un nouvel aumônier pour l’Institut. Après des années de bons et loyaux service, le père Paul, à 92 ans, est épuisé et il ne lui est plus possible de célébrer l’eucharistie. Marie-Odile qui porte ici la pastorale depuis plusieurs décennies est attristée et, en raison de la diminution des prêtres, devra sans doute organiser certains dimanches des célébrations de la Parole. Elle n’arrive pas à se faire à l’idée que ses chers résidents qui sont ici chez eux, 365 jours de l’année, n’aient plus la grâce et la chance de pouvoir vivre la messe ! L’évêché a fait savoir qu’il faudrait s’organiser autrement, compter sur les prêtres du secteur. Elle connait la bonne volonté des prêtres des environs, mais, pourquoi, pourquoi faut-il en arriver là ? Alors, avec sœur Emmanuelle, elle prie, elle prie pour que le Seigneur donne un prêtre pour saint André.
A 10h30 … passé … parce qu’ici, on prend le temps … Christophe sort de la sacristie, accompagné de 4 servants d’autel. La cloche sonne. Le chant d’entrée se met en route. Les servants de messe sont des jeunes adultes qui malgré leur handicap ont revêtu l’aube blanche (avec l’aide de sœur Emmanuelle) et de bon cœur participent à cette mission, à ce service. Dans un rituel bien rodé, chacun reçoit et connait sa mission : sonner la cloche à la sortie de la sacristie, avancer et se tourner vers le maître-autel et s’incliner en même temps que le prêtre, se mettre autour de l’autel et donner au prêtre les vases sacrés et les burettes, sonner la cloche pendant la consécration, aller porter la paix à l’assemblée, … C’est qu’ici, dans ce lieu où vivent des personnes handicapées, on a l’habitude de voir différents prêtres. Contrairement à certaines paroisses où on ne vient pas quand on sait qu’un tel ou tel autre prêtre célèbre, ici, on accueille : on est heureux qu’un prêtre vienne donner Jésus ! Et ici, à l’Institut, quand arrive le geste de paix, c’est la fête ! Chacun se tourne vers l’autre, dans la mesure où son corps le lui permet et va sortir de son banc pour aller rencontrer le reste de l’assemblée. Ici, le geste de paix prend son temps et souvent le prêtre doit attendre le retour des servants d’autel qui sont allés donner la paix dans toute l’assemblée jusqu’à la dernière personne, jusqu’au dernier banc. Combien de nos assemblées paroissiales pourraient venir prendre exemple sur la convivialité, la joie et en même temps la simplicité et la profondeur de ce qui se vit … à l’Institut saint André. Quand nos assemblées paroissiales, prêtres et fidèles portent le visage de la gravité, de la tristesse, parfois de l’individualisme, ici, on fait l’expérience que … n’est pas forcément handicapé celui qu’on croit ! En tout cas de la contagion de la foi et de l’art de communiquer … même sans pouvoir parler ou bouger avec son corps.
Christophe, le prêtre, c’est lui, le « miracle de saint Joseph » pour sœur Emmanuelle. A force de prières, telle la veuve de l’évangile qui « casse les oreilles du juge », sœur Emmanuelle et Marie-Odile auront réussi à convaincre le chaste époux de Marie. Au détour d’une nomination diocésaine, et avec un combat lié à une prière à saint Joseph … Christophe a été nommé aumônier et est donc chargé de célébrer la messe le dimanche matin. Ce jour-là c’était peut-être la deuxième ou la troisième fois qu’il y venait. Heureusement pour lui, les deux citées plus haut étaient de bon conseil, et rassurantes. Pas évident de présider la messe devant une assemblée dont la majorité des fidèles porte un handicap ! Pas évident non plus quand ces handicaps sont multiples, divers, que tous les âges sont présents en même temps dans la chapelle, quand certains mots ont tout à fait une autre portée dans ce contexte-ci ! Comment se tenir ? Quoi dire ? Quoi ne pas dire ? Il lui fallait tout apprendre … Et même, disait-il, à ré-apprendre à célébrer la messe. Non pas qu’il s’agissait de révolutionner le rituel de la messe, ce n’est pas son style, mais savoir ajuster les paroles, les mots, parfois moins de paroles, parfois plus d’explication, parfois être plus spontané, et de toute manière, pour l’homélie, court … ce qui n’est pas gagné pour ce prêtre réputé bavard dans ses homélies … Marie-Odile lui rappelait volontiers cette parole : « ici, il faut t’adresser aux résidents, pas d’abord aux personnes venues de l’extérieur ». Facile à dire, quand on a tout à apprendre ! Mais une parole nécessaire, en vérité.
Le geste de paix vient de se terminer. Christophe est dans l’admiration de cette spontanéité et de cette simplicité d’une rencontre où handicapés et les autres … se fondent dans une même communion autour d’une invitation : « Frères et sœurs, dans la charité du Christ, donnez-vous la paix ! ». Avec une certaine appréhension quand arrive le moment de la communion, il se rend aux pieds des marches du chœur. Il doit encore se sentir en confiance devant une assemblée dont il sait qu’un geste, un regard, une attitude peut provoquer des réactions parfois surprenantes,… surtout en ce moment sacré par excellence de la distribution de la communion. Il lui faudra apprendre que Jésus (qu’il tient entre ses mains !) n’a pas eu peur, lui, d’aller dans les foules improbables, dans les lieux où les codes étaient autres que ceux des bien-pensants … Dans un désordre pourtant habité, les personnes s’avancent, de la gauche, de la droite, au centre, pour recevoir Jésus. Pour un prêtre, donner Jésus, dans la messe qu’il célèbre, est la plus grand et la plus belle chose. Il a donné sa vie pour cela. Pour donner Jésus présent dans l’hostie. Ici, pas de place pour les rigoristes et les rubricistes. Certains ouvrent la bouche pour communier, d’autres ouvrent les mains, ou saisissent l’hostie. Il faut parfois aider, demander, accompagner. C’est toujours très beau de voir telle autre personne handicapée ou tel professionnel, tel paroissien aider le résident qui ne sait plus comment faire, quoi faire, par où repartir pour regagner sa place … On se croirait au moment de la distribution des pains multipliés dans l’Évangile.
Ce jour-là Patrick se présente devant le prêtre. Il s’agit d’un homme d’une quarantaine d’année, portant le handicap de la trisomie 21. Les deux hommes ne se connaissent pas encore. Christophe lui présente l’hostie : « Le corps du Christ ». Patrick, les mains ouvertes, grand sourire au visage, se laisse devenir crèche vivante quelques instants, le temps que Jésus repose entre ses mains comme dans le berceau à Bethléem. Il répond : « AMEN ». On imagine alors Patrick repartir à sa place. L’histoire pourrait se terminer là.
Mais il n’en est rien ! Alors que le prêtre saisissait déjà l’hostie suivante dans ses mains, tel un geste machinal et automatique, Patrick, resté devant lui le saisit avec empressement et, posant ses mains autour des épaules du prêtre, lui pose deux bises sur chacune des joues. Christophe est saisi d’étonnement ! Il ne sait plus quoi faire, comment se positionner. Il se demande ce qui est en train de se passer. En 13 années de sacerdoce, jamais personne ne l’avait embrassé, une fois avoir communié, une fois avoir reçu Jésus hostie. Au contraire ! Combien de fois dans son cœur avait-il pesté quand une main en forme de pince venait prendre l’hostie sans même répondre le simple « Amen » ! Ce dimanche-là, Christophe vivait une des plus belles messes de sa vie de prêtre. Dans la joie de la présence d’un prêtre qu’il ne connaissait pas, dans la joie de pouvoir s’avancer à la messe pour communier, un handicapé, trisomique, Patrick l’embrassait ! Etait-ce tout simplement une question de politesse ? Un tic ? Une manière d’être de Patrick qui faisait une démonstration affective un peu exagérée, ou mal gérée ? Christophe, l’espace d’une seconde (qui lui paraissait interminable !), se tournait vers Marie-Odile en attendant de sa part un geste, une consigne, un mot pour savoir comment se sortir de cette situation inhabituelle et peut-être inappropriée pour ceux qui suivaient dans la procession. Mais, Marie-Odile n’avait sur son visage que son sourire, ce sourire apaisant qui disait « confiance ! » ou encore « où est le problème ? ». De problème, de fait, il n’y en avait pas. Patrick venait d’inventer un nouveau rituel, celui du câlin eucharistique ! Machinalement, mal à l’aise, un peu gêné, se sentant observé par la planète entière voir tout l’univers, le prêtre lui posait une tape amicale sur la tête et déjà, Patrick se déportant légèrement, il cherchait dans le ciboire la sainte communion pour la personne suivante.
Ce câlin eucharistique se reproduit systématiquement quand Patrick vient à la messe. Il se déroule une sacrée (sic !) rencontre. En ce moment précis d’un câlin, prendre l’autre dans ses bras, faire les bises, comme il peut s’en vivre des milliers et des milliers chaque jour dans le monde entre deux personnes qui s’aiment, entre des parents et leurs enfants, entre des amis, entre deux personnes qui ne se sont plus vues depuis longtemps et se retrouvent, au moment d’une fête comme le passage de l’an, d’un anniversaire, quelque chose de très fort se vit. Le prêtre vient de communier. Jésus est présent en lui. Patrick vient de communier, Jésus est présent en lui. Mais quand Patrick prend le prêtre dans ses bras, il ne fait pas semblant : c’est de tout cœur. En cet instant qui dure l’espace de quelques petites secondes, Jésus est bien là au milieu d’eux. En leurs cœurs, à chacun, en leurs vies, mais aussi et de manière mystérieuse, dans le ciboire qui se retrouve coincé, pris au piège de la spontanéité et de l’affection de Patrick, entre les deux ! Dans le geste de Patrick, que le prêtre ne repousse pas, Jésus se retrouve comme pris au piège de cet élan de bonté et de tendresse du handicapé trisomique. Jésus est au cœur de cette image qui choquera certains, trop occupés à faire suivre des règles, des habitudes et des principes, qui provoquera la moquerie d’autres, ou qui verrons d’autres, lire le signe de ce moment. Le signe, c’est celui de la vérité : Jésus est occasion de joie, Jésus est source de paix, Jésus est celui qui rassemble les différences dans l’unité.
Ah, … si nos communautés paroissiales pouvaient avoir la simplicité de trouver en l’autre un frère, une sœur, une âme dont il faut prendre soin … Alors que dans de nombreuses églises, les fidèles s’installent sans se regarder, sans se dire bonjour, sans s’accueillir les uns les autres, la chapelle de saint André devient le modèle de ce qu’est vivre du Christ. Combien de fois quand un enfant pleure ou fait du bruit, quand de nouveaux visages arrivent, nos communautés se sentent dérangées, bousculées, … Le geste de Patrick invite à se laisser tout simplement habiter par cette question : Jésus a t’il sa place entre moi et l’autre ? Il est le trait d’union entre l’autre et moi ! Il est cette présence, cette force, cette grâce, ce miracle, ce don, ce Sauveur, ce Seigneur qui dans la simplicité, la faiblesse et la pauvreté apparente d’une hostie est capable de changer nos relations, de simplifier nos relations. Surtout, il est celui qui nous redit : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix ! ».
De confidence de prêtre, Patrick a fait grandir Christophe. Ils n’ont jamais échangé de paroles, tenu ensemble une conversation. Mais ce geste, ce moment vécu au cœur de l’eucharistie a donné à Christophe une certitude renouvelée qu’être prêtre est une grande chose, que de donner Jésus déplace des montagnes et ouvre des perspectives là où ne l’attend pas, plus. Surtout, il sait qu’il ne commence qu’à comprendre la grandeur, la force de l’eucharistie, fut-il prêtre depuis plus d’une décennie. Surtout, il ne cesse de repenser à ce qui se passe quand Patrick une fois avoir communié pose ce geste. Jésus est là dans le ciboire et vient, une fois de plus encore, comme le jour de Noël se faire tout petit, tout petit pour permettre à l’homme de faire une grande chose : poser un geste de paix, un geste qui est noble. Jésus croit en la capacité de l’homme de faire de grandes choses. C’est lui-même qui le disait à ses Apôtres : « vous ferez de plus grandes choses encore ! ». Jésus est là dans le ciboire, il est comme écrasé par le geste débordant de Patrick, une fois de plus froment moulu pour donner de la nourriture à ceux qui ont faim de lui ! C’est fou, c’est grand comme ce qu’il y a de plus sacré, l’Eucharistie, vient ainsi se mêler à ce qu’il y a de plus incarné, humain, un geste amical. On pense à Jésus sur la croix, qui, les bras grands ouverts, donne sa vie pour que le monde soit sauvé. Son geste préfigure tous les bras grands ouverts, tels ceux de Patrick, le handicapé, qui vient forcer les codes, les habitudes, les peurs, les certitudes de Christophe, souvent handicapé du cœur …
« Que c’est beau Jésus ! », disait le bienheureux Antoine Chevrier ! Oui, c’est beau, l’Eucharistie … si le monde savait ! Et si ceux qui savent peuvent s’étonner et s’émerveiller de la communion, notre monde courrait pour vivre ce câlin eucharistique …