Dans une
même journée, j’ai reçu deux gros chocs émotionnels qui m’ont amené à une
réflexion que je voudrais partager.
Sally Phillips et son fils Olly |
Dans un premier temps, j’ai regardé
la vidéo d’une émission de la BBC dans laquelle l’actrice Sally Phillips réagit
à une déclaration de Peter Singer, un partisan de "l'altruisme efficace".
Il y dit notamment (attention, il faut s’accrocher) qu’il vaut mieux tuer des
personnes sévèrement handicapées et transférer l’argent ainsi économisé pour
les maintenir dans leur état de vie dépendante vers ceux à qui cela serait plus
utile ; que la vie n’est qu’un concept religieux dépassé et que la vie
d’un gorille qui a une conscience de soi vaut mieux que celle d’une personne handicapée
sans conscience de soi. Sally Phillips, maman d’Olly, un garçon trisomique,
affirme la valeur de la vie de son fils et de toutes les personnes ayant un
handicap, demande que l’annonce du diagnostic de la trisomie 21 à une femme
enceinte soit accompagnée d’une information au minimum neutre. Elle dit : « si
on lui disait que son enfant sera heureux de vivre, apportera de la cohésion
sociale, encouragera les uns et les autres à ne pas prendre la vie trop au
sérieux, se réjouira de chose simples, ça serait présenter un système de
valeurs de manière complètement nouvelle. »
Sinon, on
risque de se retrouver comme au Danemark où il est annoncé que, d’ici 2020,
il n’y aura plus de personnes trisomiques dans le pays…
Le père Matthieu Dauchez |
Puis, le soir même, dans une église
de Paris, le père Matthieu Dauchez, directeur de la fondation ANAK-Tnk à
Manille, donnait une conférence dont le titre était "Mais pourquoi Dieu
permet-il cela ?" en référence à la question posée par une petite
fille au pape pendant son séjour à Manille. Cela, c’est la misère, la violence,
les abus que subissent trop d’enfants, des enfants des rues, des bidonvilles,
des enfants handicapés. Et le pape a répondu : « tu m’as posé la
seule question qui n’a pas de réponse… » et ils l’a prise dans ses bras.
Le pape François avait déjà donné une première réponse, la compassion et la
tendresse… Le père Matthieu Dauchez n’a pas donné de réponse lui non plus, mais
il a ouvert quelques portes pour nous aider à mieux comprendre ce qu’est le mal
et comment réagir. Sur le plan théologique, c’est un peu compliqué car on ne
peut dire à la fois : Dieu est tout-puissant, Dieu est bon et le mal
existe. Deux de ces propositions peuvent se concevoir, mais alors elles
excluent la troisième.
Une tentative de réponse a pu être donnée par Saint Augustin : Car le Dieu Tout-puissant (...), puisqu’il est souverainement bon, ne laisserait jamais un mal quelconque exister dans ses œuvres s’il n’était assez puissant et bon pour faire sortir le bien du mal lui-même.
Il faut d’abord distinguer le mal et ses conséquences : il faut haïr le mal, il est légitime de se mettre en colère, de se révolter, mais face à ceux qui souffrent à cause du mal, il faut être présent, même en silence, même avec des larmes ; il faut se montrer compatissant et savoir pardonner.
Une tentative de réponse a pu être donnée par Saint Augustin : Car le Dieu Tout-puissant (...), puisqu’il est souverainement bon, ne laisserait jamais un mal quelconque exister dans ses œuvres s’il n’était assez puissant et bon pour faire sortir le bien du mal lui-même.
Il faut d’abord distinguer le mal et ses conséquences : il faut haïr le mal, il est légitime de se mettre en colère, de se révolter, mais face à ceux qui souffrent à cause du mal, il faut être présent, même en silence, même avec des larmes ; il faut se montrer compatissant et savoir pardonner.
Dans la parabole du bon Samaritain,
le prochain n’était pas l’homme blessé, celui dont il fallait s’occuper pour le
soigner, c’était le bon Samaritain lui-même qui a su se faire proche, se faire
accepter par l’autre (qui a dû être étonné de se faire soigner par quelqu’un
qui d’habitude était peu considéré). Le prochain n’est pas celui pour qui nous
devons faire, mais celui avec qui nous devons être. La rencontre ne peut être
une véritable rencontre que si elle se fait à égalité, pas de supérieur à
inférieur, pas de celui qui sait à celui que ne sait pas… Et c’est ce que fait
la fondation ANAK-Tnk au quotidien !
Frère Thomas |
Il était
très réconfortant de voir que l’église qui contient, pleine, un millier de
personnes, était archi-comble, énormément de monde, principalement des jeunes,
étaient venus pour écouter le père Matthieu Dauchez ; beaucoup étaient
debout, assis dans les allées… Tous sont repartis le cœur brûlant
d’espérance ! Le père Thomas de Gabory, qui était l’aumônier diocésain de
Foi et Lumière à La Réunion, est parti pour rejoindre Manille où il va
collaborer aux missions de la fondation. Et la Providence a voulu que son
voyage de La Réunion vers Manille passe par Paris et qu’il soit présent à la
conférence ! Ce fut bon de le revoir et d’échanger quelques minutes. Il y
a des liens entre Foi et Lumière et ANAK-Tnk, j’ai été heureux de voir une
jeune fille trisomique sur une photo avec la Cardinal Luis Antonio Tagle qui
demandait aux enfants de la fondation ce qu’ils voulaient faire dans la
vie ; certains disaient « je serai policier ou instituteur » ;
elle a répondu tout simplement : « je serai l’amour » !
En
repartant, avec les paroles du père Matthieu Dauchez dans la tête et dans le
cœur, je repensais à ce que j’avais entendu le matin : quelle réponse
peut-on apporter au mal ? J’ai compris que devant cette équation à trois
inconnues (Dieu tout-puissant, Dieu de bonté, le mal existe), certains ont fait
le choix de répondre : « Dieu a échoué, sa création n’est pas
bonne ; nous allons faire mieux ! » et c’est le choix de vouloir
"corriger" la création, c’est revivre le mythe de Prométhée. Les
hommes ne peuvent être considérés comme des êtres humains s’ils n’ont pas une
vie considérée comme digne, certains animaux peuvent être considérés comme des
êtres humains. Que tous ceux qui raisonnent ainsi, des véritables bandits de la
pensée, aient comme Prométhée, le foie dévoré chaque jour par un aigle !
Et que de nombreuses personnes comme Sally Phillips et le père Matthieu Dauchez,
et nous tous avec eux, continuent à proclamer que toute vie vaut la peine
d’être vécu, à condition de ne pas rester seul, à condition de vivre l’amitié.
Nous devons en témoigner aussi fort que possible !
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