mercredi 29 août 2012

Quelques impressions sur le pèlerinage de Rekvere en Estonie

Du 3 au 5 août, le dernier des pèlerinages organisés par la province "Aurores Boréales" a eu lieu en Estonie. L'équipe provinciale avait choisi de célébrer l'anniversaire de Foi et Lumière dans les quatre pays dans l'ordre chronologique de la "naissance" de Foi et Lumière dans chaque pays : en 2011, trois pèlerinages ont eu lieu au Danemark, puis en Norvège et en Suède. Cette année, c'est au tour du petit dernier, l'Estonie, d'accueillir la dernière étape de ce pèlerinage itinérant. Raúl, le vice-coordinateur international qui accompagne cette province est allé participer à ce pèlerinage. Il m'a envoyé ce document avec une dizaine de photos : il raconte ses trois jours en Estonie, mais surtout, il décrit ses sentiments personnels vis-à-vis de sa mission de très belle manière ! Merci Raúl !
 

Raúl avec Aslaug

Il est presque quatre heures du matin, et je ne dors plus, alors que le réveil n’a pas encore sonné. Je dois aller rejoindre la province, "Aurores Boréales" pour son pèlerinage à Rakvere (Estonie). A mon arrivée à Tallinn, la capitale de l’Estonie, j’ai été accueilli par des personnes du Danemark, de la Suède et de la Norvège. Avec l'Estonie, ces trois pays forment une province qui compte environ 18 communautés. Dès mon arrivée, je me suis senti comme à la maison. De Tallinn à Rakvere, il faut une heure et demie en bus. Je n'ai pas vu grand-chose du paysage, car je me suis endormi immédiatement !

Tauno, pasteur luthérien, avec sa famille.
A Rakvere, nous sommes allés à la paroisse où la réunion devait avoir lieu, tout près de l'hôtel, simple mais confortable, où nous devions dormir. Je partageais ma chambre avec Ula, un papa norvégien et le chauffeur du bus de l'une des communautés d'Estonie. Mes craintes sur les bruits de ronflement se sont vite dissipées… car je me suis endormi le premier. Le pasteur de la paroisse, Tauno est un homme, jeune marié, avec un enfant d'un an et demi. Dans ce pays, la majorité des chrétiens sont luthériens, et dans cette tradition chrétienne, les pasteurs peuvent être hommes ou femmes, célibataires ou mariés. Il y avait aussi Allan, un autre pasteur, avec sa famille. Et il y avait deux femmes pasteures, avec leur fille ayant une déficience intellectuelle. J’ai été surpris de voir une célébration présidée par des pasteurs, hommes et femmes… et parents. Parmi les paroissiens, j'ai remarqué qu'il y avait de nombreuses mamans, que des mamans ! Où étaient les papas ? La charge de l'engagement et la responsabilité des enfants ne serait qu’une question de femmes ? Les familles estoniennes sont très simples, les personnes sont très ouvertes et amicales, et le niveau de vie peu élevé, au contraire des pays scandinaves. Les Estoniens ont longtemps vécu sous le joug de l'URSS. Le pays n’a acquis son indépendance qu’en 1991, puis a rejoint l'Union européenne. C’est un pays d'environ un million et demi d'habitants, dont 400.000 vivent à Tallinn, la capitale. A six heures, il n’y a plus personne dans les rues, car les Estoniens dînent très tôt, comme dans beaucoup de pays du nord.

Le chemin de croix
L’organisation du pèlerinage était très simple. Le samedi matin, nous avons eu des ateliers (musique et danse, décoration de bougies, fabrication d’anges, représentations de scènes bibliques avec des marionnettes et des dessins...). En début d’après-midi, il y a eu un chemin de croix dont les stations étaient préparées dans les jardins de la paroisse. Tout cela était organisé avec beaucoup d’enthousiasme. Pour les Estoniens, c'était la première fois qu’ils rencontraient  des personnes de  Foi et Lumière d'autres pays, et ce fut pour eux une merveilleuse découverte. Il y a pour le moment deux communautés, avec une troisième qui pourrait bientôt démarrer.
Le samedi après-midi, nous sommes allés au château de Rakvere, chargé de plusieurs siècles d'histoire. C’est là que se sont battus Scandinaves, Lettons, Russes, Polonais, Danois, Suédois, Prussiens .... La visite du château fut très plaisante, et nous y sommes restés pour le dîner. Je connaissais mal la cuisine estonienne, mais tous mangeaient de si bon appétit que je n’ai pas fait la fine bouche. Nous avons été servis par des serveuses habillées en costumes d'époque et la boisson nous fut apportée dans des verres en terre cuite : je pensais (avec grande joie) qu’ils étaient remplis de bière, mais ce n’était que du jus de cerise, boisson tous publics !

Puis il y eut une soirée festive suivie d’une prière avant le coucher. Aslaug, la coordinatrice (norvégienne) de la province, m'avait demandé d’apporter ma guitare, car personne ne jouait d’un instrument et ça pouvait être source de joie et d'animation. Et ça a bien fonctionné. La musique (avec les chants et la danse ...) est un langage universel. Tout le monde aime bouger son corps au rythme des accords, et nous savons combien cela est important pour Foi et Lumière. Je ne pouvais communiquer qu’en anglais, et seulement avec ceux qui le parlaient, et ils étaient peu nombreux. La plupart des Estoniens ne parlent pas l'anglais, mais on arrive toujours à trouver quelqu’un pour se faire comprendre. Ensuite, il y a le langage universel de l'affection : les sourires, les étreintes, le regard .... Parfois, mon nez de clown m'a aidé à communiquer et à faire rire les gens.
Nous avons terminé la rencontre en nous unissant pour la liturgie dominicale. Il y avait un petit groupe de jeunes qui a chanté et nous avons complété  leurs chants avec d'autres chants Foi et Lumière. Puis il y eut l’envoi, les remerciements, le repas et ce fut le départ. Comme partout, un départ après une rencontre Foi et Lumière est une ode à l'immortalité et à l'éternité. Les étreintes, les larmes, les échanges d’adresses e-mail, sont des moments incontournables et souvent interminables.


J'ai remarqué que seulement des petites délégations étaient venues du Danemark, de Suède et de Norvège. Au total, nous étions environ 50 personnes, soit une dimension quasi familiale. L'explication est qu’il n'était pas possible d’héberger plus de personnes dans l’hôtel... et que la priorité était de soutenir et renforcer l'Estonie. Et puis, c’était le quatrième pèlerinage organisé par la province après ceux du Danemark, de la Norvège et de la Suède en 2011. Certes, les questions économiques sont toujours un facteur limitant. Et l’organisation de ce pèlerinage a nécessité des efforts de préparation extraordinaires. Aslaug et Virge (de l'Estonie) ont travaillé dur. Coordonner les activités avec 4 pays différents est un défi important.
Personnellement, je me sens très reconnaissant pour l'accueil que j'ai reçu. J’étais l'oiseau exotique, un peu comme cet aumônier congolais dans une communauté de Madrid ! Au milieu des Vikings, il y avait un Espagnol ! Mais se sentir à la maison où que l’on soit est la richesse et le miracle de Foi et Lumière International.
Le dur labeur d'un vice-coordinateur international
Cela m’a demandé aussi des efforts : ce fut un long voyage de 3 jours. Et pour me permettre d'y aller, Laura a dû s’organiser et s’est installée chez ses parents avec nos deux enfants. Bien que ce soit moi qui sois vice-coordinateur international, c’est une mission que nous partageons à deux. Et il faut faire des efforts et des sacrifices. Mais nous le vivons ou du moins nous essayons de le vivre comme une réponse commune à l'appel de Dieu à travers Foi et Lumière.  J'aurais pu avoir de nombreuses raisons "logiques" pour dire à Ghislain : Je ne peux pas, je ne veux pas, je ne sais pas parler estonien, j'ai peur de l'avion, je n'ai pas de temps .... mais au final, je fais confiance à Dieu. Et à chaque fois, cela me fait grandir, moi et les autres, même si ce n’était pas évident au départ. Me sentir petit, avec des possibilités d'expression insuffisantes, et sans avoir les solutions aux problèmes qui me sont posés ... suppose de ma part de grandir, de me vider de mes sécurités et de m'ouvrir à la confiance en Dieu et en les autres. Je ne me suis pas senti seul, mais si j’ai ressenti cette solitude, qui est réelle, normale et naturelle pour celui qui a reçu une mission, il faut s’en remettre à Dieu dans une attitude de service, comme pour le lavement des pieds. Ce n'est pas toujours facile. J'ai besoin de ma communauté, de mes amis de Foi et Lumière, de ma famille ...
Foi et Lumière est une joie profonde, même dans la souffrance. C'est une grâce, dont je ne suis pas encore tout à fait conscient. Parfois, j’en ai l’intuition, parfois je la touche presque... D’autres fois, je me demande comment c’est possible. Un jour, dans ce pèlerinage en Estonie, j’ai mangé et en face de moi, il y avait un garçon dans un fauteuil roulant. Sa mère le faisait manger parce qu'il ne pouvait pas bouger ni parler. Il me regardait fixement. J'ai demandé à sa mère quel âge il avait ? 41 ans, comme moi ! Puis, j'ai fondu en larmes .... Pourquoi lui et pas moi? Comment est-ce possible, mon Dieu ? Pourquoi ? Qu'est-ce que tu attends de moi? Qu'est-ce que je peux faire pour toi et pour eux?

Enfin, bien sûr, je rends grâce à Dieu pour Foi et Lumière et tout ce que cela signifie pour tant de personnes simples, pour tant de personnes ayant une déficience mentale, pour tant de familles ... dans autant de pays à travers le monde. En fin de compte, que nous soyons Vikings, Africains ou Espagnols ou Portugais, tous les êtres humains sont faits de la même étoffe : nous avons besoin de la communauté, besoin d'aimer et de nous sentir aimés, nous avons besoin de raisons d'espérer, de célébrer et faire la fête, nous avons besoin de partager les blessures... Besoin de Dieu !

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